Après chaque match de Zizou Bergs, je dois bien dire que je m’étonne de lire certains commentaires qui disent, en substances: « il a perdu mais son niveau démontre qu’il a le potentiel du Top 100.«
Ce qui m’étonne, ce n’est pas que l’on dise que son tennis est de très bon niveau mais bien que l’on continue à le dire et à l’écrire.
Car cet état de fait n’est pas nouveau. Loin de là, même.
Le grand public a pu s’en rendre compte lors du tournoi d’Anvers en … 2020.
Bénéficiaire d’une wild card, Zizou était alors classé 528e et avait pris la mesure, au premier tour, d’Albert Ramos-Vinolas, (ATP 45) sur un double 7-5 7-5.
Son jeu flamboyant avait conquis le public présent et, le lendemain, déjà, on pouvait lire des commentaires laissant entendre que l’avenir du tennis belge était assuré.
436e fin 2020, Zizou a alors continué sa progression en 2021 et 2022 puisqu’il était 192e fin 21 et 129e en décembre de l’année dernière.
Il a alors atteint sa meilleur position en février dernier puisqu’il s’est approché du Top 100 et, donc, du tableau final de Roland Garros (112e).
Hélas!, depuis sa qualification pour le tableau final de l’Australien Open, Zizou ne parvient plus à remporter deux matches d’affilée.
Il a été battu d’entrée au BW Open (Gojo, 125e) avant de faire forte impression lors de son premier match de Coupe Davis face à la Corée (7-6 au 3 face à Kwon, 52e). Mais il s’est complètement loupé lors du match décisif contre Hong (257e).
La suite? Défaite initiale en qualifs à Rotterdam (Halys, 70e); défaite de justesse face à Wawrinka (130e) au premier tour à Marseille. 2e tour au Challenger de Pau (victoire contre Piros 182e et défaite face à Bellier, 194e); défaite au premier tour au Challenger de Lugano (Escoffier, 188e).
Zizou n’a alors pas pu résister aux sirènes que son agent a fait résonner, à savoir une wild card pour l’ATP 1000 de Miami. Qui, d’ailleurs, pourrait résister à une telle propoition tant on sait que Miami est considéré comme étant le meilleur tournoi derrière les Grand Chelem et qu’il est richement doté?
Le hic, c’est que c’était évidemment risqué puisque Zizou avait pas mal de points à défendre. Opposé à Kokkinakis, 105e mondial, il s’est incliné 7-6 au dernier set. Comme il était aux USA, il y est resté et a été battu au 2e tour des qualifs de Houston avant de bénéficier du titre de lucky loser. Très lucky, d’ailleurs, puisqu’il a été directement placé au 2e tour du tableau final, face à Cristian Garin, 74e mondial, contre lequel il a perdu en deux tie-breaks!
Garin qui a été battu dans la foulée par Etcheverry.
Cette semaine, Bergs joue le Challenger de Sarasota, où il rencontrera un qualifié.
Bref, on le voit, Zizou fait jeu égal avec des joueurs plus réputés que lui mais il peut aussi être battu par des joueurs qui, sur papier, semblent à sa portée.
Depuis le début de sa carrière, il a battu 3 Top 100 (Ramos Vinolas, Kwon et Popyrin) et a été assez proche d’autres victoires marquantes.
Autrement dit, et j’en reviens à mon antienne préférée: le niveau des 250 premiers joueurs – outre les monstres – est quasi le même sur un match. Le 250e peut battre le 20e. Sur un match, je pourrais même encore descendre un peu dans le classement…
Donc, ce qui fait la valeur d’un joueur, ce n’est pas son niveau de jeu sur un ou deux deux matches mais bien sur sa capacité à répéter les bonnes performances. Hélas!, pour y parvenir, il est indispensable d’être en confiance. Une confiance qui ne vient qu’en cas de succès…
Cercle vicieux?
Oui, mais il est parfois nécessaire de faire des choses que l’on n’a pas envie de faire pour rendre ce cercle non plus vicieux, mais vertueux.
Je vais prendre pour exemple David Goffin qui, en 2014, a quitté le grand circuit pour se refaire une santé mentale sur les challengers. On connait la suite: 25 victoires de rang (suite commencée par trois succès en Challengers).
Classé au-delà de la 150é position, Zizou doit désormais ne plus écouter les sirènes mais bien prendre son bâton de pèlerin et enchaîner les challengers (outre évidemment les qualifs de Grand Chelem).
D’ici Paris, il n’a pas de points à défendre mais aura un mois de juin très compliqué avec plus de 180 points à défendre (quart à Pznan, finale à St Brieuc et victoire à Ilkley). Soit, à défendre, plus de la moitié de son total actuel.
Si Zizou doit se concentrer sur des tournois de son niveau (réel et actuel), il est aussi nécessaire, je l’ai déjà écrit, que son entourage arrête de lui mettre autant de pression sur les réseaux sociaux. A chaque match, on peut avoir l’impression que le jeune Belge joue la finale d’un Grand Chelem.
Je pense que le clan Bergs (qui est évidemment animé de bonnes intentions, ce que je respecte et apprécie) doit se montrer un rien plus discret, tant sur le plan du choix des tournois que de la publicité faite autour de son joueur.
Un joueur dont je maintiens qu’il a le niveau pour aller dans le Top 100 et je pense même qu’une fois qu’il y sera, il prendra vraiment la dimension qu’il mérite. Mais, encore une fois, entrer dans le Top 100 n’est pas une sinécure et nécessite parfois des choix moins prestigieux que ceux qui ont été posés par Bergs en cette première partie de saison.