JO d’Athènes 2004. Anastasia Myskina mène 5-1 dans la dernière manche. Justine s’impose 7-5. Formidable remontada ou effondrement ?
Champions League 2005, finale. L’AC Milan mène 3-0 à la mi-temps contre Liverpool. Les Britanniques s’imposent au tir aux buts. Formidable remontada ou effondrement ?
Championnat du monde 2018. Le Japon mène 2-0 de la 52e à la 69e minute face à la Belgique. Les Diables s’imposeront 3-2 dans le temps réglementaire. Formidable remontada ou effondrement ?
Tour de France 1989. Greg LeMond a rattrapé un déficit de 50 secondes lors du contre-la-montre final pour battre Laurent Fignon de seulement 8 secondes. Formidable remontada ou effondrement.
Roland Garros 1984. Finale. John McEnroe mène deux sets zéro face à Ivan Lendl. Qui s’imposera en 5 manches. Formidable remontada ou effondrement ?
Wimbledon 2011. Roger Federer mène deux sets zéro en quart de finale face à Jo-Wilfried Tsonga. Le Français finit par gagner contre celui qui est alors le meilleur joueur du monde sur gazon. Formidable remontada ou effondrement ?
Quand un match comme celui de David Goffin d’hier se termine, il est toujours nécessaire de prendre un peu de recul et, surtout, d’être capable de changer d’angle de vision.
Il est ainsi quasi certain que la presse tchèque évoque davantage la remontada de Tomas Machac que l’effondrement de David Goffin.
Car, oui, en effet, il y a souvent une combinaison des deux faits. L’un des sportifs, qui sait qu’il n’a plus rien à perdre, peut, quand il tire ses dernières munitions, se libérer complètement alors que son adversaire, qui est proche du but, peut, lui, se tendre quelque peu, beaucoup, énormément. C’est ce que l’on appelle, en tennis, le principe des vases communicants.
Que l’on me comprenne bien, ce qu’il s’est passé hier est frustrant, énervant, difficilement compréhensible. Mais c’est le tennis.
Il menait 6-3 6-3 3-1 et ensuite 5-0 dans le dernier set ? Oui, c’est vrai. Mais je rappelle les règles : pour gagner un match masculin en Grand Chelem, il faut gagner trois sets et, surtout, il faut gagner le dernier. Lequel se termine quand un joueur gagne au moins 6 jeux, parfois 7, parfois le tie-break.
David a mené 5-0. C’est dur. Je répète que c’est énervant, que c’est frustrant.
Mais voilà, si on était obligé de gagner à 5-0, l’ITF devrait alors décider que le set se termine à 5-0. Puis, on dirait la même chose à 4-0, puis à 3-0.
Oui, David a arrêté de pousser, il n’a pas mis la tête sous l’eau de son adversaire. C’est un peu sa marque de fabrique. Il n’est pas de ceux qui donnent l’estocade finale.
Ce n’est pas dans son tempérament. C’est énervant, c’est frustrant, c’est décevant. Mais cet état de fait ne l’a pas empêché de battre des joueurs comme Djokovic, Federer, Nadal, de monter dans le Top 10 mondial et d’aller deux fois en finale de Coupe Davis.
Certains vont dire que je lui cherche des excuses.
Il n’y a pas d’excuses à donner. En tennis, il y a deux joueurs qui, tous les deux, veulent gagner le match. Et, comme il n’y a pas d’égalité en tennis, il n’y a qu’un seul vainqueur. Donc, je ne vois pas pourquoi je devrais trouver des excuses à un professionnel qui rêvait de gagner, qui aurait pu gagner. Qui aurait, sans doute, dû gagner.
Mais il a perdu.
C’est ainsi, c’est le tennis.
Que ce soit au plus haut niveau, au plus bas niveau, au niveau moyen, le match ne se termine que quand la balle de match est conclue.
Je me rappelle d’un interclubs en Juniors Vétérans division régionale 1. Mon partenaire, dont le tairai le nom 😉, menait 6-0 5-0 40-0. A la perte du jeu qui aurait pu être le dernier, il m’a regardé et m’a dit, je vais perdre. J’ai tout tenté en le coachant, mais il a perdu.
Le doute s’était installé dans son esprit.
Et, quand le doute s’installe, le bras se bloque.
Hier, le plus énervé, le plus frustré, le plus déçu était sans nul doute David Goffin.
C’est beau, le tennis. Dur, mais beau.